Les facteurs humains en design  : partie 1

Série  Les facteurs humains en design – Partie 1 : Comprendre les capacités humaines pour mieux concevoir

Par Noëmie Candau, le 14 novembre 2025,

Nous entendons régulièrement parler de l’importance des facteurs humains dans la conception d’interfaces, de produits et de systèmes. Erreur humaine, ergonomie, utilisabilité, accessibilité… les notions associées aux facteurs humains sont nombreuses et leur application en design peut sembler nébuleuse. Pourtant, la considération des facteurs humains dès le début du processus de design est une démarche essentielle pour créer des objets sécuritaires, pertinents et agréables à utiliser.

Ultimement, leur bonne évaluation permet de concevoir des produits offrant des expériences d’utilisation fluides. Cette démarche facilite ainsi l’adoption d’un nouveau produit ou d’une nouvelle technologie et contribue à fidéliser les utilisateurs auprès d’une marque.  À l’inverse, tenter d’intégrer ces principes a posteriori se révèle généralement inefficace. Dans cet article, nous allons résumer les principes fondamentaux des facteurs humains et leur influence sur la conception des produits.

Dans le premier article de cette série, nous allons résumer les principes fondamentaux des facteurs humains et leur rôle dans la prévention des erreurs d’utilisation. La suite de cette série portera sur leur apport indispensable dans la création de nouveaux produits et les méthodologies à privilégier aux différentes étapes du processus.

Les facteurs humains, à la croisée des individus et de leur environnement 

Commençons par définir ce que les facteurs humains désignent. Ce champ d’étude porte sur les interactions homme-machine ou homme-système. En effet, toutes les interactions nécessaires à l’utilisation d’un produit ou d’une interface sont le résultat de l’interprétation cognitive des humains et de leur réponse physique. Face à un produit, nous tentons d’abord de comprendre son fonctionnement, puis, d’activer ses fonctions. La réussite ou l’échec de la tâche accomplie peut avoir de profondes répercussions sur la personne et son milieu tant en termes de sécurité et de productivité que de bien-être physique et psychologique. Les recherches s’attachent donc à comprendre de quelle manière les systèmes influencent le comportement humain en tenant compte des capacités et des limites perceptives et motrices des individus. Dans cette optique, l’erreur involontaire n’est pas attribuée à un manquement de l’utilisateur mais plutôt à un manquement du système: ce sont les interfaces et les objets qui doivent être adaptés aux capacités humaines et non l’inverse.

Il faut donc bien comprendre les particularités du fonctionnement humain pour concevoir des interfaces et objets qui guideront les gens dans leur utilisation. Notre cognition, nos sens et notre motricité ne sont pas celles des autres organismes vivants et, de surcroît, nos capacités individuelles varient. Pour mieux comprendre ces particularités, les facteurs humains bénéficient des recherches issues de différentes disciplines comme l’anthropométrie, l’ergonomie ou encore la neuropsychologie, pour n’en citer que quelques-unes.

En tant que designers, nous aspirons à concevoir des produits qui facilitent et améliorent le quotidien des utilisateurs. L’ingénierie des facteurs humains intégrée au processus de design permet de s’assurer que les choix de conception répondent aux processus cognitifs et aux capacités physiques des utilisateurs. Leur rôle en développement de produits peut influencer des aspects aussi importants que la sécurité, l’accessibilité, le confort, l’apprentissage et la satisfaction.

L’investigation et la prévention des erreurs d’utilisation

Les erreurs d’utilisation peuvent entraîner des conséquences allant de la simple frustration à la blessure grave. Une erreur d’utilisation d’appareil médical, par exemple, pourrait avoir un impact irréversible sur la santé d’un patient. Cependant, il existe différentes manières de prévenir les erreurs ou de réduire la gravité de leurs conséquences.

Une approche classique consiste à investiguer les causes d’erreur. Cette approche est particulièrement pertinente pour comprendre et corriger les causes d’incidents sur les systèmes existants mais peut également être appliquée à des tests de prototypes avancés.

L’investigation doit notamment permettre d’identifier si l’erreur est liée à une difficulté à effectuer correctement la tâche souhaitée ou à une difficulté à interpréter quelle tâche réaliser. Prenons l’exemple d’un opérateur qui devrait activer une manette sur son poste de contrôle; dans un premier cas de figure, la manette est clairement identifiée mais difficile d’accès : l’opérateur pourrait échouer à activer physiquement son mécanisme. Dans le second cas, la manette est accessible mais son apparence ne respecte pas les conventions standardisées et ressemble à un autre type de contrôle. Cette confusion pourrait mener l’opérateur à activer le mécanisme de la mauvaise manette !

Identifier le type d’erreur permet ensuite d’agir sur ses causes lors de la conception ou de l’amélioration des produits. En reprenant l’exemple précédent, cela nécessiterait d’ajuster le positionnement, la taille et le dégagement de la manette dans le premier cas, et, dans le second cas, de modifier son apparence voire son mode de fonctionnement en tenant compte des normes habituelles. À cela s’ajouteraient également des signaux de réponse et de statut permettant à l’opérateur de confirmer qu’il a bien activé la bonne manette.

Mais que faire dans le cas de nouveaux produits, qui n’ont pas encore d’historique d’utilisation ? Dans le second article de cette série sur les facteurs humains en design, nous expliquerons quels principes considérer lors de la création de produits ou systèmes appelant de nouveaux usages.